S07/S08 – l’Albanie c’est pas la Californie

Beaucoup de chemin parcouru depuis la Bosnie. Au Monténégro d’abord, puis en Albanie où notre voyage prend une nouvelle dimension. Difficile de retranscrire l’ambiance particulière de ce pays très contrasté mais attachant. Petit montage vidéo en prime, pour l’occasion : lien ici

Passage au Monténégro

Nous avons quitté la Bosnie par une petite frontière à 900m d’altitude, pour atteindre le Monténégro. Nous n’en verrons malheureusement que le littoral, au cours d’une traversée d’une petite semaine (incluant deux jours de pause à Bars).

Le Monténégro est un petit pays qui faisait partie de la Yougoslavie de Tito (ce qui n’est pas le cas de l’Albanie). Nous en verrons d’ailleurs les reliquats en passant au musée “Naval héritage collection”, avec quelques spécimens impressionnants de sous-marins de l’époque.

Au Monténégro l’approvisionnement en eau devient aléatoire, et sa potabilité incertaine. Par contre, les paysages sont beaux ! On a l’impression que les montagnes sortent littéralement de l’eau. D’ailleurs ça grimpe pas mal dès qu’on veut quitter la route côtière.

Arrivée en Albanie

On s’attendait à un changement d’ambiance, mais peut-être pas à ce point. La frontière se fait bien sentir. Nos vélos nous permettent d’abord d’éviter une bonne heure de bouchons au poste frontière. Au bord de la route, de nombreux marchands de rue vendent quelques fruits, ou des préparations alimentaires très artisanales (jus dans des bouteilles plastiques réutilisées, macérations étranges…).

La circulation est chaotique, mais les conducteurs sont plutôt bienveillants. Les voitures côtoient les piétons, les vélos, des véhicules bricolés à base de mobylette, mais aussi beaucoup d’animaux qu’il n’est pas rare de voir sur la route nationale. Les animaux sont partout ici (en liberté ou au bout d’une corde) : moutons, ânes, chèvres, vaches, oies, et cochons dans les zones où les chrétiens sont présents.

On est aussi frappé par les odeurs prononcées qui voguent dans l’air : les animaux bien sûr, mais aussi les poubelles, les aliments vendus en bord de route, le foin, parfois les égouts… tout ça se mélange dans des arrangements déroutants.

Aux abords des villes et villages, des vendeurs s’installent à même la route pour vendre quelques poissons, ou des bistrouilles en plastique. Le niveau de vie est ici très inférieur à la moyenne européenne, et nous mangeons correctement au restaurant pour 2€ par personne (un peu moins vrai sur le littoral).

Shkodër

Pour notre première nuit en Albanie, nous avons trouvé une ferme “éco-sociale” qui propose de l’accueil pour les vélo-voyageurs. Nous n’y rencontrerons malheureusement pas les acteurs du projet, mais nous y faisons en revanche de belles rencontres avec des voyageurs de passage : Fabian, cyclo allemand, Alessandro volontaire italien à la ferme, et un couple argentin qui voyage en stop sur les cinq continents.

Nous passons une superbe soirée et partageons un bon repas italien tous ensemble dans la salle commune. Merci à Alessandro pour la préparation du repas et le relais de l’accueil !

Nous profitons de cette étape pour visiter Shkodër, dite “l’Amesterdam ablanaise” du fait des nombreux vélos qui grouillent dans cette ville. La comparaison s’arrête là, car Shkodër est un joyeux bazar de 135 000 habitants, sans aucun feu de circulation, où chacun semble trouver sa place dans une alchimie un peu obscure. On sent que la ville est vivante.

La réalité albanaise

Plus on progresse dans ce pays plus il nous étonne. On voit une quantité incroyable d’ossatures béton de bâtiments qui n’ont jamais été finis (poteaux + dalles + escaliers, sans murs), tels des squelettes figés dans le temps.

Les déchets sont absolument partout, et il n’est pas rare de voir des chèvres ou des chiens errants fouiner dans les monticules à la recherche de quelques restes organiques. Le pire c’est qu’on s’y habitue assez vite, ça fait un peu partie du premier plan des paysages. Au détour d’un petit chemin de terre, nous avons même croisé un cadavre de vache, découpé en morceaux, en cours de décomposition… Nous sentons d’abord l’odeur, puis découvrons une patte, un morceau de poitrine, une autre patte…

De nombreux Albanais n’ont pas de voitures et se déplacent à pied, à vélo, ou tirent une charrette avec des chevaux. Quant aux voitures, une bonne partie sont des genres de vielles Merco des années 90… Mais le dénominateur commun de tous les Albanais que nous croisons, c’est la cordialité, les grands sourires, et les encouragements.

Lorsque que l’on progresse à vélo, on passe tous les kilomètres devant un vendeurs de quelques légumes ou fruits, au bord de la route. Leurs étals tiennent souvent dans deux cagettes à peine : Ici une mamie fait griller quelques épis de maïs, là un papi vend une dizaine de poivrons… tous nous saluent, et certains font un signe vers le ciel.

L’Albanie s’est redressée tardivement d’une des pires dictatures d’Europe de cette époque (plus de 3000 exécutions pour une population d’1 million d’habitants). Son développement économique actuel est réel mais semble parfois erratique. On a par exemple des fois l’impression qu’un budget important a été injecté dans une infrastructure luxueuse, qui trône entre deux décharges à ciel ouvert.

Pour finir le portrait de l’Albanie que nous avons vue, nous avons été étonnés du peu de mécanisation de l’agriculture. Ici, la moitié de la population active travaille aux champs. On les voit biner, bécher, récolter le maïs et l’égrainer à la main, transporter leurs récoltes en brouette…

Nouvelles rencontres

Alors que nous faisons quelques courses sur le bord de la route, une famille franco-belge s’arrête. Nous avons bien croisé quelques cyclo-voyageurs, mais c’est la première famille que nous rencontrons depuis l’Italie. On échange un peu, et on décide de rouler puis de bivouaquer ensemble dans une belle pinède de la lagune de Karavastë (super spot). L’endroit est très propre, ce qui contraste pas mal avec ce que nous avons vu jusqu’à présent.

C’est très sympa de pouvoir partager nos expériences et nos anecdotes de voyage dans les Balkans. Ils sont partis de Belgique début juillet, et doivent atteindre Istanbul le 1^ernovembre pour leur vol de retour.

Timéo et Eglantine sont eux ravis de pouvoir jouer avec Hugo (4 ans), le plus grand de leurs deux enfants (Chloé n’a qu’un an). Un morceau de corde de quelques mètres sera un bon prétexte pour s’inventer des jeux en tous genres…

Le lendemain nous faisons route commune jusqu’à Vlorë, sur des routes presque désertes, où l’on peut même rouler à quatre de front. Nos chemins se séparent, mais nous avons apprécié de partager quelques coups de pédale avec eux.

La suite

Nos différents échanges nous questionnent pour la suite… La Turquie nous tente vraiment, mais il risque d’y faire un peu froid. D’autres options sont à l’étude, mais l’invariable reste Bangkok pour passer l’hiver au chaud. A plus court terme nous devons affronter les grands cols qui nous séparent de la Grèce, et ça va pas être une mince affaire !

                                                                              ……………….

2077 km

Vlorë, Vendredi 23 Septembre – 23h17, 15°C